Environnement économique - Septembre 2025
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Politiques monétaires divergentes
Nos perspectives économiques et financières
Aux États-Unis, la nouvelle administration s’inscrit dans la continuité des précédentes, avec la volonté de défendre et asseoir les avantages compétitifs du pays et à en réduire les vulnérabilités dans un monde où son leadership est désormais contesté par la Chine. Cette politique américaine privilégie des approches bilatérales confirmant la volonté de réorganiser les échanges mondiaux sur une base plus régionale. Un mode de fonctionnement qui se généralise dans le cadre d’un multi régionalisme plus affirmé. En Europe, l’Allemagne a annoncé des réformes budgétaires historiques et un plan d’investissement important pour répondre aux défis structurels auxquels son économie est confrontée. L’ampleur des effets des plans allemand et européen sur l’activité de l’UE fait face aux défis de leur mise en place et à la compétition d’accès aux financements, enjeu de rivalité majeur à l’intérieur de la zone. Ce contexte alimente les facteurs structurels inflationnistes que nous décrivons. Cependant, nous restons vigilants sur les effets des droits de douane américains sur la dynamique de l’activité mondiale et ses effets sur l’inflation.
Face à l’évolution des relations internationales impulsée par les États-Unis, l’Union européenne cherche à renforcer ses relations commerciales avec l’Asie et la Chine appelle à l’émergence d’un « monde multipolaire ordonné ». Par ailleurs, si la Réserve fédérale a renoué avec la baisse de son taux directeur dans un contexte de dégradation du marché du travail, BCE et BoE se montrent plus prudentes sur fond d’inflation persistante. En France, le gouvernement Bayrou a chuté et son successeur est dans une situation délicate, aucune majorité ne se dégageant à l’Assemblée nationale. Sur le marché des changes, l’euro s’est apprécié de 0,4% sur le mois contre le dollar, à 1,1734. Le prix du baril de Brent a baissé de 1,63% par rapport au mois précédent, à 67,02$.
Aux États-Unis, le comité de politique monétaire (FOMC) a abaissé de 25 points de base l’objectif de taux des fed funds, à [4,00% ; 4,25%]. Cette décision résulte essentiellement de la confirmation de la dégradation du marché du travail : les créations d’emplois ont nettement ralenti (22 000 en août) et la première estimation de la révision annuelle des statistiques de l’emploi conduit à revoir le nombre total d’emplois en baisse de près de 1 million. Le FOMC se partage désormais entre ceux qui veulent donner une priorité absolue à l’objectif de plein-emploi, qui appellent à une détente rapide de la politique monétaire (dont le nouveau gouverneur Stephen Miran, conseiller économique de Donald Trump), et ceux plus prudents qui restent inquiets de l’inflation. En août, l’indice de prix des dépenses personnelles de consommation était en hausse de 2,7% sur un an, contre 2,5% le mois précédent. De nombreuses décisions prises par la présidence ces derniers mois et dont la légitimité a été remise en cause par des tribunaux fédéraux sont désormais en attente de décision de la Cour suprême. C’est notamment le cas des droits de douane supplémentaires, dont la dernière version a été communiquée début août, mais aussi du limogeage de Lisa Cook, gouverneur de la Fed, dont le caractère effectif ouvrirait la voie à un remodelage en profondeur de la composition du FOMC.
Au Royaume-Uni, la Banque d’Angleterre a laissé son taux directeur inchangé, à 4,00%, au terme d’un vote une nouvelle fois partagé. Alors que les indicateurs d’activité se sont dégradés ces dernières semaines, deux membres du comité de politique monétaire souhaitaient une nouvelle baisse de 25 points de base. Elle a annoncé diminuer le rythme de diminution de son portefeuille d’actifs pour les douze prochains mois. L’inflation reste très au-dessus de son objectif de 2% (3,8% en août), sans signe de reflux.
Alors que l'inflation ne baisse plus dans la zone euro (2,0%, en juin, juillet et août), la BCE a encore laissé sa politique monétaire inchangée. Les banquiers centraux européens semblent partagés sur les risques pour les prochains mois, dans un contexte où les salaires restent dynamiques en dépit de signes précurseurs de ralentissement. Les premières estimations d’évolution des prix en septembre, publiées par les quatre plus grandes économies, confirment le maintien d’une inflation proche de l’objectif de la BCE. En France, le gouvernement Bayrou a chuté après l’échec du vote de confiance demandé par le premier ministre. Son successeur a été rapidement nommé, mais Sébastien Lecornu n’a pas encore formé son gouvernement. L’instabilité politique empêche de projeter des politiques de redressement des finances publiques et a contribué à la décision de Fitch Ratings d’abaisser la note de la dette souveraine française. Parallèlement, les notes espagnole, portugaise et italienne ont été relevées. Dans le domaine commercial, l’Union européenne a adopté le traité Mercosur, qui doit encore être ratifié par les États-membres et être entériné par le Parlement. La Commission européenne multiplie aussi les négociations avec plusieurs pays d’Asie afin de conclure des accords de libre-échange ou bien d’améliorer ceux qui existent.
En Chine, l’activité économique reste peu dynamique : la production industrielle et les ventes au détail ont encore ralenti en août et l’investissement s’est contracté. Outre une activité domestique toujours en perte de vitesse, les exportations souffrent du relèvement des droits de douane américains. Dans ce contexte, la tendance à la baisse des prix se poursuit, malgré la multiplication des soutiens publics. Dans leurs relations avec les États-Unis, les autorités chinoises soufflent le chaud et le froid. Ces dernières semaines, elles ont annoncé renoncer volontairement aux privilèges commerciaux que lui confère le statut de pays en développement à l’OMC, mais elles ont interdit aux entreprises chinoises d’importer des puces Nvidia destinées au secteur de l’intelligence artificielle. Dans le même temps, un accord a été trouvé pour donner le contrôle de TikTok États-Unis à des Américains et l’enquête antitrust chinoise sur Google a été arrêtée. Lors du sommet annuel de l’Organisation de coopération de Shanghai, organisé en Chine, Xi Jinping a appelé au développement d’un monde multipolaire ordonné, nouvelle manifestation du rejet d’un ordre international dominé par les États-Unis.
Au Japon, alors que l’inflation a diminué en août, à 2,7%, la banque centrale a laissé ses taux directeurs inchangés. L’institution monétaire a annoncé vouloir diminuer ses portefeuilles de parts de fonds cotés et de fonds immobiliers. Les données d’activité restent mal orientées, en particulier dans le secteur manufacturier.
Sources des données : Datastream, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Office for National Statistics, Eurostat, BCE, S&P Global, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Rédigé par

Jean-Louis MOURIER
Analyste Macroéconomique
1er octobre 2025